Décolonisation et construction de nouveaux Etats

Ce chapitre se compose de deux leçons.

 

A. De la décolonisation à la mise en place de nouveaux Etats.

 

Instructions officielles: Après avoir rapidement évoqué les étapes de la décolonisation, on montre que les nouveaux États indépendants doivent compter avec l’héritage colonial et faire face à de nombreux défis : . politiques : construction d’un État, d’une unité nationale, choix et mise en œuvre d’un type de régime ; . économiques et sociaux : choix et mise en œuvre d’un mode de développement, intégration à l’économie internationale et rapports à l’ancienne puissance coloniale. On précise comment ces États cherchent à y répondre en fonction du contexte régional et des rapports de force mondiaux.

 

B. L'Algérie de 1954 à 1962. 

 

Instructions officielles: L’Algérie est dotée d’un statut particulier au sein de l’Empire colonial français. On analyse son processus de décolonisation en montrant sa dimension singulière (guerre, violences frappant l’ensemble des composantes de la population, crise politique en métropole, etc.). On souligne que les conditions de son accès à l’indépendance ont un impact durable sur ses relations avec la France. 

Notions de ce chapitre

Anticolonialisme: C'est l'opposition au principe même de la colonisation, c'est-à-dire à l'installation sur un territoire habité de nouvelles populations étrangères venues se l'approprier et le mettre en valeur. L'anticolonialisme comporte aussi une dénonciation de l'exploitation et de la spoliation (=le fait de leur prendre ce qui leur appartient) des populations colonisées par les colonisateurs.

 

Décolonisation: Ce mot, encore nouveau au début des années 1960, désigne un processus par lequel les territoires colonisés se trouvent libérés de leurs colonisateurs. Ce processus est complexe et renvoie à la fois aux combats menés par les peuples colonisés pour obtenir leur indépendance et à la décision (plus ou moins contrainte) des colonisateurs de quitter les territoires colonisés. Les peuples colonisés préfèrent parler d'émancipation.

 

Attention aux termes liés à la colonisation/décolonisation:

-Les colonisateurs: ce terme très général renvoie en bloc aux métropoles (les pays qui colonisent un territoire donné), à leurs autorités publiques, à leurs citoyens. Mais dans aucun pays, au milieu du XXè siècle, il n'y a un consensus (=un accord entre tous) sur la colonisation/décolonisation.

-Les colons : ce terme désigne uniquement les étrangers installés dans des colonies, c'est-à-dire dans des territoires colonisés qu'ils se sont appropriés. Les colons peuvent être nés là et vivre là depuis plusieurs générations.

-Les peuples colonisés: ce terme est particulièrement large et trompeur. Parler de peuple colonisé suppose que, lorsque les territoires ont été colonisés, leurs habitants appartenaient à un groupe qui se reconnaissait une identité commune. Ce serait au nom de cette identité commune que ce peuple demanderait son indépendance. Or n'oubliez pas deux choses:

*les frontières des territoires colonisés sont des frontières coloniales, c'est-à-dire produites par les colonisateurs. Ce ne sont pas les frontières d'un peuple donné.

*les habitants des colonies ne sont jamais unanimes (=tous d'accord) sur la décolonisation. En effet, certaines catégories ont au contraire intérêt à la présence des colonisateurs. 

 

Développement: Ce terme désigne l'état de l'économie (production de richesse) et de la société (niveau de vie, accès aux soins et à l'instruction, inégalités diverses) de la population sur un territoire donné. Il désigne aussi le processus par lequel ce territoire améliore l'état de son économie et de sa société. La géographie s'intéresse particulièrement à la manière dont le développement se répartit dans l'espace, c'est-à-dire aux inégalités spatiales de développement.

L'idée de développement et de sous-développement est née au lendemain de la Seconde Guerre mondiale. Elle fait référence au fait qu'une partie du monde connaît des conditions de vie misérables qui doivent être améliorées. En 1966 est créé le Programme des Nations Unies pour le Développement (PNUD). Sa mission est d'aider les territoires qui en ont besoin à améliorer le niveau de vie de leur population. Le terme de pays "en développement" remplace progressivement celui de pays "sous-développé", jugé péjoratif.

Par ailleurs, le terme de développement lui-même subit une critique: il est assimilé à partir des années 1980 à un développement industriel dangereux pour l'environnement et socialement inégalitaire. Aujourd'hui, on préfère parler de développement durable, c'est-à-dire transmissible de génération en génération (certains refusent même le mot de développement et invitent à la décroissance économique: produire moins pour vivre mieux).

Enfin, la croissance économique très forte de certains pays (devenus pays émergents) et l'hétérogénéité économique (=l'existence d'une diversité très forte) des pays en développement amène depuis les années 1990 à parler de Sud économique et de plus en plus de Suds, avec un "s" du pluriel.

 

Impérialisme: C'est le fait, pour une puissance donnée, de soumettre des territoires extérieurs à sa volonté pour satisfaire ses intérêts stratégiques (militaires, géopolitiques), économiques (production de richesse), sociaux (satisfaction des demandes de sa population) et culturels (répandre ses croyances). La colonisation de territoires, la conquête, la mise en place de relations asymétriques (=inégales) avec d'autres territoires relèvent d'une pratique impérialiste. L'impérialisme ne passe pas seulement par l'usage de la force, mais également par des stratégies de persuasion, voire par des formes de séduction économique et culturelle. Ceux qui dénoncent l'impérialisme culturel des Etats-Unis critiquent ainsi tout un modèle de vie calqué sur ce qu'on appelle le "rêve américain" et ses pratiques de consommation.

 

Non-alignement: Il s'agit d'une stratégie géopolitique suivie par un certain nombre de pays du Tiers-monde après la décolonisation. Une fois indépendants, dans un monde dominé sous la guerre froide par les blocs opposés de l'Ouest et de l'Est, les pays non alignés ont choisi de n'entrer dans aucun des deux blocs.

Deux grandes dates marquent l'émergence du non-alignement comme une sorte de troisième voie. En 1955, lors de la conférence de Bandung (en Indonésie), réunit les représentants de 29 pays africains et asiatiques qui choisissent le non-alignement. Cette conférence est aussi un acte de naissance du Tiers-monde. En 1961, la conférence de Belgrade (Yougoslavie) confirme la naissance du groupe des non-alignés. Les chefs du mouvements sont Nasser (président de l'Egypte), Nehru (président de l'Inde), Tito (président de la Yougoslavie) et Sokarno (président de l'Indonésie).  

Le mouvement des non-alignés existe encore de nos jours. Comme dans le passé, il est profondément divisé. Il est, comme dans le passé, le lieu d'une critique des puissances dominantes (aujourd'hui, les Etats-Unis). Il est aussi devenu espace qui permet à des pays isolés sur la scène internationale de contester l'ordre mondial. Lisez la critique que fait un journaliste du Bukina-Faso à l'occasion du sommet des non-alignés de 2013 (site du Courier International).

 

Tiers-monde/Sud économique: Le terme de Tiers-monde fait référence à deux réalités différentes mais complémentaires. La première est une réalité socio-démographique (liée à la société et à l'évolution des populations): le terme est inventé par Alfred Sauvy (un démographe français) et Georges Balandier (un ethnologue français) en 1952. Par référence au tiers-état (présenté à la Révolution française comme la partie la plus nombreuse de la nation et celle qui possède le moins de droits), Alfred Sauvy présente les pays issus de la décolonisation comme les pays les plus peuplés et dont la population augmente le plus vite et comme les pays les plus pauvres. L'autre réalité est géopolitique. Le Tiers-monde est le monde né de la décolonisation et qui, derrière Nasser (président de l'Egypte), Nehru (président de l'Inde), Tito (président de la Yougoslavie) et Sokarno (président de l'Indonésie), refuse de s'aligner, dans le monde de la guerre froide, à un bloc ou l'autre.

Le terme de Tiers-monde n'est plus aujourd'hui utilisé par les économistes et les géographes, qui lui préfèrent celui de Sud économique. Ce nouveau terme est né des réflexions menées à l'ONU dans les années 1980 par la commission Brandt, qui invente la limite Nord-Sud (voir Nouveaux rapports de force dans un monde multipolaire).

Aujourd'hui, on parle de Suds, au pluriel, en raison de l'extrême hétérogénéité (=diversité) économique et sociale des pays qui se trouvent au sud de la limite Nord-Sud: pays émergents (parmi eux, la Chine, première puissance économique mondiale), pays plus ou moins développés et PMA (pays les moins avancés).


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